Le blog - Faire tomber les tabous

Billet ajouté le 25 janvier 2023 à 18h17

Les débuts d’année sont toujours d’excellentes occasions de faire le bilan des mois passés, en tirer les enseignements qui s’imposent et donner aux dirigeants l’opportunité de s’exprimer pour recueillir leur vision d’avenir.

 

Nous avons donné la parole à Guillaume Staub, Président et co-fondateur de Prev&Care. Sous le format d’une interview il nous éclaire sur les défis sociétaux et managériaux d’une société en mouvement et nous communique l’ambition de Prev& Care pour les relever.

 

Guillaume Staub, pouvez-vous resituer le contexte ?

 

Aujourd’hui 1 salarié/5 a la charge d'un proche malade, handicapé ou fragilisé par l'âge.

70 %des salariés non-aidants indiquent qu’ils seront certainement aidants dans les 5 ans. En 2030 ce sera 1 sur 4 qui devra faire face à cette situation.

 

La question est donc bien structurelle, et la tendance s’affirme.

Leur état de santé ? 90% de ces salariés évoquent stress, anxiété et fatigue, 40%sont en dépression.

72% considèrent que l’accompagnement de leur proche a une incidence négative sur leur concentration et leur efficacité au travail.

 

Le sujet est en train de s’ancrer dans notre société et a des conséquences sur l’engagement des salariés aidants.

 

Vous rencontrez de nombreux dirigeants, perçoivent-ils les enjeux de l’aidance de leurs salariés ?

 

Les directions des ressources humaines sont en première ligne dans les entreprises pour évaluer et traiter la question des salariés proches aidants. De plus, « l’engagement auprès des salariés aidantsest un enjeu de RSE », « à la croisée de multiples thématiques déjà inscrites dans les outils de la RSEet dans les thèmes de négociation obligatoire : l’égalité femmes-hommes, la non-discrimination, le handicap, la QVT, le bien-être au travail et l’équilibre vie professionnelle/vie personnelle. »

Le sujet monte et les entreprises visionnaires s’en sont petit à petit emparées...

En 2022, selon l’étude OCIRP* pour 85% des DRH le sujet des salariés aidants sera important ou prioritaire à l’avenir.

 

Car l’aidance des salariés est aussi un sujet relié à la performance, à la productivité, aux coûts invisibles. On le comprend aisément ; si un salarié aidant est sujet à de nombreuses absences, doit partir plus tôt

régulièrement, il peut y avoir une incidence sur l’équipe car la charge doit être répartie sur les autres collaborateurs. Aussi pour 78% des DRH le soutien aux salariés proches aidants est un levier de performance pour leur entreprise

 

Une entreprise qui a décidé de soutenir ses salariés aidants par la mise en place d’un dispositif d’écoute et de soutien a une plus grande attractivité et une image positive aux yeux de nouveaux talents à recruter. Cela contribue à sa notoriété et à son image bienveillante.

 

Les salariés aidants sont soutenus par leurs collègues

 

96,8% des salariés non-aidants trouvent qu’il est important que leur entreprise contribue à trouver des solutions concrètes pour leurs salariés aidants

La fidélisation des salariés est un enjeu de taille pour les entreprises et ce type de mesures contribue à créer de l’attachement.

 

Les enjeux du soutien aux salariés aidants sont clairement identifiés par les entreprises et commencent à prendre leur place dans les Politiques RH et Politiques RSE.

 

Qui sont ces salariés aidants en 2023 ? Leur profil a-t-il changé ?

 

On trouve majoritairement aux avants postes des femmes dans des familles de plus en plus monoparentale avec enfants.

L’âge avance de façon assez spectaculaire : 39 ans en 2021 ; 36 ans en 2022,

Pourquoi ? parce que contrairement aux idées reçues, un salarié aidant n’est pas seulement un senior en charge de parents âgés dépendants. L’aidance concerne l’accompagnement des pathologies lourdes et celles du handicap (conjoint, enfant, fratrie...).

 

Leurs attentes ont-elles évolué ?

 

Oui, ils ne souhaitent plus spécialement prendre un congé aidant, c’est une solution curative qui a le mérite d’exister certes mais le lien social dans l’entreprise leur offre une bouffée d’oxygène dont ils ne peuvent pas se passer. De plus ils ne veulent pas être écartés des projets de l’entreprise. Quant à l’impact financier il est aussi important. Lors de son lancement ils ne sont que 5000 à en avoir fait la demande.

 

La période Covid a-t-elle changé le rapport à ses salariés ?

 

Elle n’est pas étrangère à un retour aux valeurs fondamentales de solidarité, d’entraide, d’empathie, d’écoute, de bien-être, et d’attention portée à ceux qui sont mis en difficulté notamment lorsqu’ils sont aidants d’un proche fragilisé.

 

Pour toutes ces raisons notre conviction est que ce sujet des aidants doit passer par l’entreprise qui a un vrai rôle à jouer.

Dans ses nouveaux modèles d’organisation elle doit pouvoir être force de proposition et soutien de ses collaborateurs dans la confrontation de la fragilité au sens large et qui intègre dépendance- handicap- maladie.

 

En tant que partenaire des entreprises, nous sommes régulièrement confrontés à des appels de salariés qui nous demandent conseil, soutien, accompagnement sur des problématiques de maladies et de plus en plus de pathologies de cancer. Ce sont des salariés de plus en plus jeunes (37/47 ans) ; non seulement ils ne sont pas préparés mais cela bouscule une vie familiale et cela réinterroge la vie professionnelle.

 

Hier encore tabou, le sujet sort de la sphère privée pour être partagé par ses amis, sa famille, mais également ses collègues de travail, son employeur.

 

A l’instar d’Arthur Sadoun, Président du directoire de Publicis, qui ces derniers jours, levait le voile sur sa posture de transparence adoptée pour communiquer sur sa vulnérabilité et son combat contre un cancer dont il a été saisi ces derniers mois.

Une communication très courageuse auprès de ses actionnaires et salariés pour partager une réalité et continuer à se battre en assumant sa maladie et ses traitements associés.

 

A l’identique, ces derniers mois Catherine Guillouard, patronne de la RATP, annonçait sa démission pour se consacrer à son rôle de proche aidant auprès de ses parents. Une démarche rare parmi les patrons. Signe d’un changement d’époque ?

 

On ne cache plus la fragilité alors qu’elle faisait partie de l’intime et de l’inquiétude d’être sanctionné par une mise au placard dans son parcours professionnel.

 

Changement de paradigme porté par le progrès de la médecine, la démographie vieillissante de nos sociétés occidentales ?

 

On reconnait aux salariés aidants des soft skills précieux (savoir-faire et savoir -être) recherchés dans un collectif de travail.

De fait le point de vue du management change, ces salariés-aidants ne sont plus un poids mais une richesse. On leur laisse le temps de résoudre leur situation, l’entreprise les accompagne et creuse des solutions comme celles que propose Prev&Care qui va jusqu’à l’accompagnement de la mise en œuvre des solutions.

Le discours de l’entreprise est positif, de fait en communiquant, on peut mener de front son combat et continuer à être aux commandes. Reste à convaincre les salariés qu’ils peuvent se déclarer sans en être inquiétés.

 

En conclusion, quelles recommandations formulez-vous pour relever le défi de nos sociétés ?

 

Je pense qu’il faut sortir des tabous et faire tomber les barrières en encourageant les salariés aidants ou salariés fragilisés par la maladie à partager leur réalité et à afficher leur authenticité ; l’entreprise de son côté doit faire évoluer sa culture en acceptant la vulnérabilité de l’humain, pour apporter de l’aide et du soutien à ses salariés afin qu’ils poursuivent sans être inquiétés de leur devenir professionnel.

 

Ces valeurs de solidarité et d’entraide ne seraient-elles pas en train de se mettre en place dans les entreprises ? Du côté de nos clients partenaires, nous constatons une évolution dans ce sens.

 

Bien sur la performance est toujours un objectif, une condition nécessaire pour rendre pérenne l’entreprise mais ma conviction est que si l’entreprise sait pendre soin de ses salariés, leur engagement ne sera que meilleur, pour la plus grande satisfaction de tous.

 

Après avoir œuvré pour la mise en place d’e dispositifs informationnels, puis de soutiens psychologiques utiles, il est temps d’évoluer vers un dispositif organisationnel, c’est ce que nous nous attachons à faire chez Prev& Care pour que ce sujet soutienne concrètement le salarié aidant et réponde à l’efficacité des entreprises.

 

Propos recueillis le 24 janvier 2023, Guillaume Staub Président et co-fondateur de Prev&Care.

 

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OCIRP* Observatoire des salariés aidants Etude OCIRP / VIAVOICE 2022 : « Salariés aidants, RH, RSE et dialogue social »

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